Après 3h de vol, nous arrivons sur l'île d'Efate au Vanuatu, en Mélanésie. Il pleut des cordes car c'est la saison des pluies et des cyclones. Le point positif, c'est qu'il n'y a presque pas de touristes. Mais du coup le premier jour c'était un peu Beyrouth : personne dans les rues, les routes défoncées pleines d'énormes flaques, les bâtiments en béton gris et défraîchis... on se demandait un peu où on était tombé. En plus, on nous dit que la veille il y a eu un séisme de magnitude 7... ce qui ne semble pas inquiéter les locaux qui y sont habitués. Et évidemment, nous avons eu droit à une nouvelle secousse dès notre première nuit ! Bizarre de se faire réveiller au milieu de la nuit avec l'envie d'enguirlander la personne qui se permet de secouer notre lit ! :0) Heureusement, dès le lendemain le beau temps est de retour et nous pouvons partir explorer l'île en voiture. Hors Port Vila, la capitale assez moderne avec ses bars, ses restaurants, ses magasins et ses hôtels, où les jeunes essaient d'avoir "la cool attitude" des occidentaux en étant habillés comme des rappeurs, les gens semblent avoir conservé leur culture et on se retrouve seules sur les routes à croiser des mini-bus locaux et des villages typiques. Les Ni-Vanuatu sont très souriants et chaleureux et nous font signe dès qu'ils nous repèrent. Ils ont l'air heureux malgré la simplicité dans laquelle ils vivent. Le Vanuatu a d'ailleurs été reconnu comme le pays le plus heureux du monde en 2007.
L'archipel est constitué de 83 îles situées dans le Pacifique et on y parle 110 langues, en plus des 3 officielles : le bichlamar, l'anglais et le français, ce qui en résulte qu'il est le pays possédant la plus forte densité linguistique au monde.
Jadis, des rites cannibales entre villages ennemis étaient pratiqués et le premier missionnaire qui arriva dans l'archipel en 1839 fut mangé. Mais le catholicisme s'installa quand même dès 1887. Et en 1904, la France et le Royaume-Uni qui tout deux convoitaient le Vanuatu, décidèrent de mettre sur place un condominium. Ce fut la seule fois où un pays fut géré par deux puissances conjointement. Grâce à sa colonisation lente et désorganisée due aux mésententes entre les deux pays, le Vanuatu a pu conserver sa culture. Il devient indépendant en 1980.
80% des gens habitent en zone rurale et vivent de l'agriculture, la plupart dans des villages de moins de 50 personnes, dirigés par un chef. C'est lui qui règle les conflits, même conjugaux (le divorce n'existe évidemment pas)
. Les coutumes "kastom" font toujours partie intégrante de la vie de ces villages. Elles permettent de maintenir la loi et l'ordre. Beaucoup de querelles sont réglées pacifiquement par l'échange d'un cochon (sacré ici) par exemple. De nombreuses cérémonies (dances, magie noire, sacrifices de cochons, kava,...) ont lieu à chaque événement de la vie sociale (naissances, circoncision, passage à l'âge adulte, mariages, funérailles,...), alors que les missionnaires ont essayé de les éliminer. Dans chaque village, il y a un nakamal : hutte où les hommes se rencontrent pour parler des affaires du village en buvant du kava. Cette place est taboue : sacrée et interdite aux femmes. Les Ni-Vanuatu pensent qu'il est important de perpétuer les coutumes pour que les générations futures puissent vivre en paix et en harmonie.
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Les 2 îles que nous avons visitées, Efate et Tanna |
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Dans Port Vila, la capitale du Vanuatu (sur l'île d'Efate), on se déplace en mini-bus que l'on pait CHF 1.50 quelque soit le trajet. Mais on ne sait jamais si on doit adresser la parole au chauffeur en français ou en anglais, car les gens ont appris qu'une des 2 langues (en plus du bichlamar), selon s'ils étaient du côté français ou anglais !
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La première nuit : des rafales, des trombes d'eau et une secousse sismique |
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Nous avons loué une voiture pour faire le tour de l'île en un jour |
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Super expérience, car les gens nous faisaient signe et nous disaient "Alo!" avec des larges sourires, mais stressant car il y a toujours un cochon, une poule, un chien ou un crabe prêt à vous sauter devant les roues...et les enfants prennent la route pour un terrain de foot ou discutent tranquillement assis au milieu de la route !
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500 Vatu = 5.10 CHF |
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Un iguane au Secret Garden |
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Un boa du Pacifique |
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Musée sur le cannibalisme. Le dernier cas de sacrifice humain a été reporté en 1969, dans la tribu des Big Nambas |
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Baignade avec les locaux à Eton Lagoon, un lagon dans la jungle |
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Le parcours du combattant pour arriver aux cascades |
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Mele Cascades |
Trois jours plus tard, nous nous envolons pour Tanna, à 45 min d'Efate. Beaucoup plus sauvage qu'Efate, il y a de l'électricité que sur la côte ouest et là encore que 4h par jour. Il n'y a pas de distributeur d'argent et le confort est très basique. Et comme les routes ne sont pas goudronnées et qu'on est à la saison des pluies, c'est vite l'aventure.
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Première excursion pour en apprendre plus sur la magie noire qui fait partie des coutumes : on devra abandonner la voiture et continuer à pied jusqu'au village.
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Ils nous ont montré comment les missionnaires étaient reçus à l'époque où ils étaient encore anthropophages et ça nous a fait rigoler jusqu'à ce qu'ils se cachent et que ces 2 nous attrapent les mollets en hurlant ! Là on a fait un beau saut ! :0)
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Un enfant caché dans le banyan (ci-dessus) |
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Ils nous ont montré 2-3 choses "magiques". Ici, un charme d'amour pour que mes parents (un petit peu divorcés quand même) restent toute leur vie ensemble si les deux feuilles restaient collées et... les feuilles ont collé ! :0)
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Là, comment porter quelqu'un à l'aide de feuilles entrecroisées |
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Et un peu moins magique : la circoncision à l'aide d'un bambou ! Elle se pratique vers l'âge de 8 ans. |
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Nous n'avons pas vu de réelle magie noire, qu'ils gardent secrète, mais finalement ce qui a été magique, c'était cette expérience où nous avons eu la chance d'être seules avec des locaux et de pouvoir discuter des coutumes de nos pays respectifs. Car à la fin de la visite, ils ont troqué leurs costumes de feuilles contre des shorts et t-shirts et on a fait un bond dans le présent en parlant de politique. Ils aiment bien Obama et trouvent notre système suisse avec nos 7 conseillers fédéraux intéressant.
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Puis nous partons voir le fameux Mt Yasur, le volcan actif le plus accessible au monde. Nous espérons pouvoir atteindre son sommet car un cyclone est annoncé et le temps s'assombrit.
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Le Mt Yasur (361m) gronde au loin |
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Pour s'y rendre, on passe des routes boueuses et des paysages lunaires recouverts des cendres du volcan |
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On traverse des rivières... |
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et des routes qui fument... |
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Et nous voilà enfin au pied du Yasur
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Puis à côté de son cratère où nous avons de la peine à respirer à cause du H2S qui nous brûle la gorge et les yeux. |
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Le vent est si fort que les cendres nous fouettent le dos et les jambes et s'infiltrent partout et on peut à peine ouvrir les yeux...
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Nous l'entendons gronder et le sentons trembler, mais ne voyons pas la lave au fond du cratère |
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Alors après avoir mangé des cendres et du H2S pendant une heure, nous décidons de partir. Car ici ce n'est étonnamment pas le guide qui décide de quand ça devient trop dangereux et qu'il faut redescendre mais les touristes, qui poussent souvent les guides à prendre des risques. Un peu déçues de ne pas avoir vu la lave, on se fait une raison et on s'incline devant Mère Nature qui a décidé d'envoyer un cyclone le jour de notre visite au volcan.
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Le lendemain, nous partons visiter un village traditionnel où la vie des gens n'a pas été influencée par notre culture occidentale. Il n'y a pas si longtemps, ils n'avaient pas d'argent car ils cultivaient leur propre nourriture, mais maintenant ils en ont besoin pour payer l'écolage des enfants. Leur mode de vie est basé sur les traditions. Les hommes portent le "namba"(étui pénien) et les femmes des jupes en paille.
Nous nous embourbons de nouveau...
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Le chauffeur tente de passer la boue seul.. il prend de l'élan et arrive... |
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là... :0) |
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Alors on décide de rejoindre à pied la distance (1h15) qui nous sépare du village... Ma mère, plus maligne que moi, avait mis ses chaussures de marche.. Moi je voulais faire locale et j'avais décidé de mettre mes tongs... Mais ceux qui ont essayé de marcher dans la boue avec des tongs savent que ce n'est pas la meilleure des idées car la tong fait ventouse et reste collée dans la boue dès le premier pas ! :0)
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Alors voilà, je me suis en effet retrouvée comme les locaux, à marcher pieds nus dans la boue, aussi gracieuse qu'un pingouin sur la banquise, en essayant de ne pas faire un vol plané car à chaque fois que je titubais et que je me rattrapais de justesse, j'entendais des rires d'enfants sortir des maisons ! :0)
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Nous traversons des villages et les locaux nous font toujours des grands signes mais doivent se demander ce que font 2 blanches seules à se balader alors qu'ils annoncent un cyclone...
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Et enfin nous arrivons au village et une guide et sa fille nous accueillent pour pouvoir y entrer. |
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Dans chaque village traditionnel, la vie s'organise autour d'un banyan (sorte de figuier). Ce qui m'a beaucoup fait penser à l'Arbre-Maison des Omaticaya dans Avatar. D'ailleurs les Ni-Vanuatu vivent en osmose avec la Nature et n'ont besoin d'aucune technologie. Tout ce qu'ils utilisent provient de la forêt.
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Ils nous montrent comment faire du feu en frottant 2 bois ensemble |
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et allument une cigarette. Seuls les hommes ont le droit de fumer. |
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Ils nous montreront également des danses tribales |
Nous sommes émerveillées par la gentillesse des Ni-Vanuatu et avons passé un moment magique dans un monde à des années lumières de notre civilisation. Nous avons très peu communiqué avec eux et cela que par l'intermédiaire de notre guide, car ils ne savent ni français, ni anglais, ni bichlamar mais parlent un dialecte bien à eux. En revenant du village, notre chauffeur nous attend, tout stressé et un peu inquiet et nous dit de nous dépêcher car le cyclone arrive sur Tanna d'ici 2h. Nous refaisons les 1h de chemin qui nous sépare de la jeep à pied, presque en courant car les branches des palmiers tombent sur la route et la pluie et le vent sont déjà très forts.
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La tempête arrive.. |
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De retour à l'hôtel, on attend que le cyclone arrive. Nous passons le temps en discutant avec une sympathique famille de Nouvelle-Calédonie, les seuls autres touristes. La mer est déchaînée et a atteint le niveau de l'hôtel à marée haute, mais est heureusement redescendue maintenant. On nous dit de faire nos sacs au cas où nous devons partir dans un abri plus solide. Mais finalement nous irons dormir dans notre chambre qu'ils ont murée avec des panneaux en bois. Nous passerons une nuit mouvementée entre le bruit de la tempête, une nouvelle secousse sismique, le manque d'air à cause des panneaux et l'attente d'un éventuel déménagement d'urgence.
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Le lendemain, tout est calme. A part un panneau arraché et beaucoup de dégâts au jardin, nous avons eu la chance de ne pas être dans l'oeil du cyclone. Mais on lira plus tard qu'il y a quand même eu des rafales de 200km/h et de gros dégâts aux habitations et aux cultures.
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Le cyclone Jasmine et l'île de Tanna (au bout de la flèche) |